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Exposition « Objectif Développement » à Grenoble : les clichés trompeurs de l’aide publique française


Communiqué, le 18 octobre 2012

Du 17 au 28 octobre, Grenoble accueille l’exposition nationale « Objectif Développement : nouveaux regards sur le Sud », qui regroupe 7 reportages photos commandés à une agence professionnelle pour montrer au grand public certaines réalisations de l’Agence Française de Développement (AFD). L’association Survie Isère dénonce cette opération de communication et propose quelques rappels utiles sur l’Aide Publique au Développement française.

« nouveaux regards » et vieille rengaine
En guise de « nouveaux regards », l’AFD offre une fois de plus une vision caricaturale du « Sud » et du « développement » : sans évidemment signaler la vision occidentale qui imprègne l’usage de ces mots, elle livre à nouveau une conception dépolitisée, paternaliste et folklorique des dynamiques en cours dans les pays où elle intervient, ignorant les processus politiques d’organisation et de mobilisation populaires. Quant à la ville de Grenoble, elle en profite pour vanter le 27 octobre sa coopération décentralisée avec Ouagadougou, dont le maire est pourtant le n°3 du parti au pouvoir au Burkina Faso depuis un quart de siècle. Hasard de calendrier ? A l’opposé, le 15 octobre, les résistant-e-s africain-e-s commémoraient à Ouagadougou et dans l’agglomération grenobloise les 25 ans de l’assassinat du président burkinabè Thomas Sankara, qui a précédé cette dictature plus longue que celle du tunisien Ben Ali ; rendre hommage à ces dynamiques de résistance aurait, pour une fois, permis à la mairie de porter un « nouveau regard ». Encore loupé !

Aide au développement des dictatures et du pillage
Cette exposition contribue à promouvoir un discours trompeur sur l’aide publique au développement de la France. En mettant en avant 7 projets dans lesquels des financements publics français ont pu permettre d’améliorer le quotidien de quelques personnes, l’Agence Française de Développement cherche à redorer l’image de son institution et de l’Etat français.
Car la réalité est tout autre : sous couvert d’aider au « développement », les autorités françaises maintiennent depuis plus de 50 ans une ingérence économique et politique directe. Ainsi, les errements passés des Plans d’Ajustement Structurels (PAS), qui permirent aux Etats occidentaux et au FMI d’imposer dans les années 90 des privatisations et une politique d’austérité, ne sont pas terminés : encore en 2011, la France a versé 20% de son aide multilatérale aux institutions de Bretton Woods (FMI, Banque Mondiale...), tandis que moins de 5% allaient vers l’ONU (dont des miettes pour l’UNICEF, le HCR, le Programme Alimentaire Mondial...). Même au niveau bilatéral, de prétendues annulations partielles de dettes permettant de maintenir la solvabilité de ces pays, préparent le terrain à des politiques offensives de prêts pour financer des chantiers le plus souvent remportés par des entreprises françaises. Cette subvention déguisée à des intérêts tricolores est parfois explicite : grâce à des mécanismes « d’aide liée », qui conditionnent le versement d’un prêt avantageux à l’embauche d’entreprises françaises, la Cour des Comptes a souligné en juin qu’un euro d’aide liée « investi » par l’Etat avait rapporté en moyenne 5 à 10€ de contrats internationaux au patronat français.
Surtout, « l’aide » est un subtil habillage de dispositifs de soutien aux dictateurs favorables aux intérêts français : sous couvert de « coopération policière et militaire », la France entraîne et conseille les armées dictatoriales qui répriment les opposant-e-s et les soulèvements populaires – le fameux « savoir-faire français » dont parlait Michèle Alliot-Marie à propos de la Tunisie en janvier 2011.

« Petits » montants et gros effets
Les montants en jeu sont loin d’être anodins : on parle chaque année de centaines de millions d’euros qui contribuent directement ou indirectement au maintien des dictatures et des mécanismes de pillage. Et il serait faux de croire que ces montants au service de causes criminelles ne comptent pas par rapport aux sommes utilisées « à bon escient » : D’une part, au niveau mondial, même le gouvernement reconnaît que les « pays en développement » perçoivent aujourd’hui des montants 10 fois inférieurs au pillage dont ils sont victimes. Mais surtout, il suffit qu’une petite part des sommes versées serve à conforter ces régimes et ces systèmes de pillage et d’exploitation, pour discréditer l’ensemble de « l’aide au développement » française. Aujourd’hui encore, elle reste un instrument de la Françafrique.

Pour porter de « nouveaux regards » sur la relation franco-africaine, Survie Isère propose d’ici décembre d’autres rendez-vous aux grenoblois-es : rendez-vous sur notre page Agenda !


Et pour en savoir plus sur l’aide au développement :
- "Argumentaire" de Survie sur l’aide au développement (2010) : http://survie.org/francafrique/article/l-aide-publique-au-developpement-3626
- Brochure "A qui profite l’aide au développement ?" des Renseignements Généreux : http://www.les-renseignements-genereux.org/brochures/405